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Frédéric Staniland - Sur le site de l'ARALD

Tout commence le 27 janvier 1967 à Saint-Paul-Trois-Châteaux dans la Drôme.

Après...après quoi ? 

Mon premier souvenir est celui d'une rousse se lavant nue à mes côtés dans un bac en granit, à 18 mois.

Cette image ne perturbera rien, à part mon amour inconditionnel des rousses depuis toujours.

Le souvenir se glisse au centre de trois années de camping et de caravaning dont je n'ai presque aucun souvenir.

J'aime à croire pourtant que cette errance à fait de moi ce que je suis aujourd'hui, un désinvolte du changement, un émancipé de l'attachement matériel.

Jusqu'à mes 12 ans, rien ne se passe. Enfant sage, je traverse ma scolarité sans encombre.

Et puis, c'est le divorce. Le papa et la maman modèles se séparent, laissant un goût amère. Laissant surtout une enfance inachevée. Une maison vidée en catimini, sans retour. Les maquettes et les soldats de plastique abandonnés derrière moi.

Je pense à eux parfois. Où se sont-ils réfugiés ? Un autre enfant a-t-il profité de mes bacs et de mes sacs remplis ?

Je rêve de retourner vers cette dernière demeure et d'y retrouver, comme un tableau laissé-là, ma chambre et son décor comme je les avais abandonnés.

 

Voilà. C'était avant le reste. Le reste de ma vie. 

J'ai l'impression parfois que ma vie d'enfant s'est coupée net. Comme si l'adulte que je suis aujourd'hui l'était devenu en une fraction de seconde, un jour d'adolescence.

Ce jour-là, je ne saurais dire lequel exactement, j'ai dû faire un choix.

Appréhender mon futur tel que je le devais, tel que je pouvais l'imaginer.

Je crois, en réfléchissant un peu, que la charnière a eu lieu autour d'une phrase de mon prof de math.

En déménageant en hiver, j'ai investi le nouveau collège en cours d'année scolaire et suis tombé sur un prof principal de troisième un peu sévère.

Je me rappelle de la teneur de ses premiers propos : "toi, tu ne passeras pas en seconde".

À vrai dire, dans mon souvenir, je crois que je ne l'ai pas cru. Plus d'une décennie de naïveté ne m'avait pas préparé à une telle acidité, une telle malveillance. Et mon premier réflexe fut de l'entendre sans l'écouter. 

Ce n'est que lorsque j'ai réalisé qu'il mettrait à profit tout son pouvoir professoral pour atteindre son objectif que j'ai compris qu'il ne s'amusait pas. 

Dès lors, j'ai basculé dans un combat perdu d'avance. 

Mais un combat qui a fait naître en moi un sentiment d'amertume. 

Et même si ses humiliations répétées m'ont poussé au découragement, je me suis, cette année-là, forgé sur le lit de l'injustice.

Ma scolarité, après, n'a jamais plus été pareille. 

Ma seconde troisième, je l'ai vécue en bataillant le podium des cours de mathématique chaque trimestre. 

Mais surtout, grâce à son abus, mon âme, mon existence, ma vie ne pouvaient plus subir les cruautés partiales et les inégalités autoritaires. 

Dès lors j'avais choisi, fais un choix, en mon âme et conscience, que plus aucun professeur, plus aucune autorité ne pouvait me faire bouger de ma place. Parfois, certes, ma place était mauvaise et de nombreuses fois, j'ai eu tort de ne pas m’arque-bouter. Mais chacun de mes choix, bon ou mauvais, m'ont tous appris quelque chose.

Que le plus important n'était pas là. Le plus important était que, malgré l'épreuve, je restais droit, le regard fixe, à défendre mes choix contre n'importe qui.

Ce fut une période difficle. Pour mes profs comme pour moi. Mais elle m'a appris une chose essentielle, qui libère la vie d'un homme lorsque l'apprentissage est accompli : j'étais le seul maître de mon destin, le seul capitaine de mon âme. 

 

​Je me rappelle donc de ces joutes littéraires avec des profs de français. Des combats acharnés durant mes pauvres trimestres de lycée. J'ai gâché un seconde, redoublé, recommencé.

Entamé une première, sans jamais la finir.

C'en était trop pour moi. Je n'ai jamais pu accepter l'image d'un idéal d'éducation nationale.

Je ne pouvais me résoudre à penser comme eux. À vivre comme eux. Trop simple, trop facile.

En dehors de l'image de monde.

Pour être honnête, je crois que mes professeurs de l'époque n'avaient pas envie de me voir leur ressembler.

 

J'ai donc quitté le lycée. Un sport-études fascinant durant lequel j'ai passé trois années à jouer.

De ce jour-là, il me reste un souvenir. Un genre d'images multiformes.

Je me revois sortant de la grande bâtisse de la rue Frédéric Faÿs avec mon sac sur le dos. Je vais passer les grilles. Le retour n'est plus possible.

À cet instant je me souviens m'être posé une seule question : "qu'est-ce que tu voulais faire quand tu étais petit ?"

La réponse fut d'une évidence aussi plate que bénéfique : du cinéma.

À l'époque déjà, j'étais un passionné du 7ème art. Tenant des fiches sur les films, les réalisateurs, les acteurs.

Mes amis m'appelaient parfois pour me demander des précisions sur telle ou telle questions.

Comment s'appelait l'acteur ? Quel est le titre du film ?

C'est ainsi que je suis entré dans une entreprise de production lyonnaise qui enseignait également : les Studios du Scorpion. Deux stages de réalisation et d'écriture de scénario plus tard, cette même société me proposait de travailler sur leur prochaine co-production.

 

La suite plus tard...

 

 

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